( Texte que j’ai écrit et publié à l’origine sur Voldemag )
Nota : Cet article fait partie d’une série de 4 articles (le mieux c’est de commencer par le premier)
J’appuie.
Il ne bouge plus. Il s’est effondré sans un bruit, sans un cri, sans un râle.Il s’est effondré, c’est tout. Il s’est effondré comme si la vie l’avait lâché d’un seul coup, sans prévenir, comme un pantin dont on coupe les cordes. Il s’est effondré, et il ne bouge plus.
Je suis déçu.
Je m’attendais à plus. Je m’attendais à beaucoup plus. Même son dernier souffle est passé inaperçu. Je n’ai rien entendu, rien vu, rien senti. Je suis déçu.
Je suis déçu et ça m’énerve. Tant de préparatifs, tant de nuits à imaginer, à essayer de prédire l’imprévisible, tout ça pour rien !
Peut-être est-il encore vivant ? Peut-être fait-il semblant ?
Je jubile à l’idée de ne pas être passé à coté finalement.
Je lui dis de se lever, que sa comédie a assez duré, que je suis las et impatient !
Il refuse de bouger. Il me nargue, j’en suis sur maintenant ! Il aurait du gémir, pousser un dernier cri, un dernier souffle, ce n’est pas possible autrement.
Je le retourne d’un grand coup de pied, d’énervement.
Il était à genoux quand j’ai tiré, et j’ai tiré de derrière, à bout portant, pour ne pas être déconcentré par son regard ou ses larmes. J’ai tiré en écoutant, tous les sens en éveils. Je ne voyais pas son visage, et je ne le verrais plus jamais, il a tout simplement disparu, réduit en une immonde bouillie sanglante qui traîne maintenant sur le bitume.
Je suis déçu.
Il est mort et il a tout fichu en l’air. Il n’a pas été à la hauteur, incapable d’avoir une mort correcte. Je suis déçu, lui crache dessus par dépit et par haine.
Je vais faire mieux. Bien mieux !
Je vérifie l’état de l’arme, efface les gouttes de sang, vérifie qu’une nouvelle balle est en place, vérifie le silencieux.
Je jubile. Je vais enfin savoir.
Je place l’embout du canon sous ma bouche, loin des oreilles pour ne pas gêner ma perception. Je veux tout entendre, tout savoir. J’imagine. Je me vois tomber en arrière. Je me vois lâcher un dernier souffle, râle profond. Je me vois jeter l’arme en tombant. Je repère la poubelle à ma droite. Je me vois sourire en tombant, heureux de savoir, enfin.
Tous mes sens sont en éveil, avides et curieux.
J’appuie.